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LE COMBATTANT
22 avril 2020

La Défense de Laurent Gbagbo s’associe au Procureur et à la RLV pour demander le report de l’audience prévue le 11 mai 2020.

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Photo d'Archives et d'illustration

 

CPI : Réponse de la Défense à la « Prosecution’s application to postpone or cancel the appeal hearing scheduled for 11-13 May 2020 and to consider alternative proposals to expedite the appeal » (ICC-02/11-01/15-1330).
I. Rappel de la procédure.
1. Le 15 janvier 2019, la majorité de la Chambre de première instance I faisait droit à la demande de la Défense de Laurent Gbagbo et acquittait ce dernier de toutes les charges portées contre lui .
2. Le 16 juillet 2019, la Chambre de première instance I notifiait aux Parties et participants les « Reasons for oral decision of 15 January 2019 on the Requête de la Défense de Laurent Gbagbo afin qu'un jugement d'acquittement portant sur toutes les charges soit prononcé en faveur de Laurent Gbagbo et que sa mise en liberté immédiate soit ordonnée, and on the Blé Goudé Defence no case to answer motion » .

3. Le 16 septembre 2019, le Procureur déposait son acte d’appel .

4. Le 15 octobre 2019, le Procureur déposait son mémoire d’appel .

5. Le 26 novembre 2019, la Chambre d’appel rendait une « Decision on victim participation », dans laquelle elle indiquait que les victimes disposaient de 30 jours pour déposer leurs observations après le dépôt de la réponse de la Défense au mémoire du Procureur ; et qu’ensuite la Défense aurait 30 jours pour répondre aux observations de la RLV .

6. Le 6 mars 2020, la Défense déposait sa réponse au « Mémoire d’appel de l’Accusation » .

7. Concernant l’impact de l’épidémie de COVID-19 sur les activités de la Cour : le 13 mars 2020, les autorités de la CPI annonçaient la fermeture des locaux de la CPI en raison de l’épidémie de COVID-19 au moins jusqu’au 31 mars 2020. Par Note Verbale du 24 mars 2020, les autorités Néerlandaises informaient la Cour qu’elle était tenue de respecter les mesures notamment sanitaires adoptées par les Pays Bas. Le 24 mars 2020, la fermeture des locaux de la CPI était prolongée par les autorités de la CPI jusqu’au 13 avril 2020. Le 31 mars 2020, le gouvernement hollandais annoncait le maintien de mesures liées au COVID-19 jusqu’au 1 juin 2020. Le 1 avril 2020, la fermeture des locaux de la CPI était prolongée par les autorités de la CPI jusqu’au 28 avril 2020.
8. Le 16 mars 2020, le Procureur déposait une « Prosecution notice of intention to file a request for leave to reply pursuant to regulation 60 » par laquelle il annonçait vouloir déposer une demande de réplique à la réponse de la Défense le 10 avril 2020. Il y indiquait que : « However the Prosecution also respectfully notifies the Appeals Chamber that this current intention will require continual review and reassessment based on how the situation surrounding the COVID-19 outbreak in The Netherlands unfolds in the coming weeks. This is particularly in light of the disruptions which will be caused by staff now being required to work from home in difficult circumstances, and given that some staff in the office have already become unwell and there is a real potential for others to be similarly affected based on what is known about the spread of the illness » .

9. Le 20 mars 2020, la Chambre d’appel rendait un « Order scheduling a hearing before the Appeal Chamber and setting a time limit for any request for leave to reply » par lequel 1) elle ordonnait au Procureur de déposer sa demande d’autorisation de répliquer avant le 14 avril 2020 et 2) ordonnait la tenue d’une audience du 11 au 13 mai 2020 pour discuter du « the above-mentioned appeal » .

10. Le 14 avril 2020, le Procureur déposait une « Prosecution’s provision of information in relation to further written submissions » dans laquelle il informait « the Appeals Chamber that it does not seek leave to file a written reply to the Defence Responses. Instead, the Prosecution will address any arguments raised in the Defence Responses and respond to any questions from the Appeals Chamber during any hearing, as appropriate » .

11. Ce même 14 avril 2020, la Défense de Charles Blé Goudé demandait à la Chambre d’appel par voie d’email de répondre aux questions suivantes : « Are the oral hearing dates confirmed in light of the continuing development of the Covid-19 situation affecting, inter alia, the functioning of the Court? Can the Defence expect to be provided with a list of questions in advance of the hearing and if so, how much in advance? » .

12. Ce même 14 avril 2020, le Procureur indiquait par voie d’email que « in view of the importance of the below issues to all parties and participants, the Prosecution wishes to inform the Chamber that it is prepared to make written observations on these issues, and considers that the best time to do so would be once the Government of The Netherlands has made its next announcement (expected 21 April) on whether and/or to what extent the present Covid-19 restrictions will be extended or lifted, and the Court’s decision on this matter following that announcement. Assuming restrictions will remain in place at the Court, our observations would include suggesting alternative means of expeditiously progressing the appeal including by way of the parties and participants making written submissions in response to any questions issued by the Appeals Chamber, followed by an appeal hearing being held, to the extent necessary, later in the year when occupational and public health and safety considerations allow for a safe return to the building. » .

13. Ce même 14 avril 2020, la RLV indiquait par voie d’email que « In relation to the below exchange of correspondence, the CLRV will provide her position upon notification of the Prosecution’s observations. In any case the CLRV wishes to stress the importance of the present proceedings for Victims and their interest in an expeditious resolution of the appeal. Therefore, she welcomes the Prosecution’s intention to suggest alternative means of expeditiously progressing the appeal » .

14. Le 15 avril 2020, la Défense de Laurent Gbagbo indiquait par voie d’email que que « Compte-tenu de l’importance des questions abordées dans cet échange d'emails, la Défense de Laurent Gbagbo informe la Chambre, les Parties et les participants qu’elle déposera elle aussi des observations écrites à la lumière de la situation qui prévaudra aux Pays-Bas, en Belgique et à la Cour pénale internationale après le 21 avril 2020 » .
15. Le 17 avril 2020, le Procureur déposait une « application to postpone or cancel the appeal hearing scheduled for 11-13 May 2020 and to consider alternative proposals to expedite the appeal » dans laquelle il demandait à la Chambre d’appel de « postpone or cancel the appeal hearing presently scheduled for 11-13 May 2020 and to instead consider alternative means to conduct the remainder of the appeals proceedings in this case in a fair and expeditious manner. This application is made because of ongoing concerns about holding a three-day appeal hearing at the Court in the midst of the current COVID-19 pandemic in the Netherlands » et précisait que : « The Prosecution has a well-founded concern, based on the relevant information available in the public domain on the known contagiousness of COVID19 and given the high and ever-increasing rate of COVID-19 infections in the Netherlands, that holding the court hearing at this time will endanger the health and lives of persons who participate in the three-day hearing. This includes the Judges, Prosecution Counsel, Defence Counsel, OPCV Counsel, other staff from Chambers, Registry and the Prosecution, and Mr Gbagbo and Mr Blé Goudé. In the Prosecution’s view, this is a risk that should not be taken, especially when other equally viable means of expeditiously conducting the appeals proceedings are available » .

16. Le 20 avril 2020, la RLV déposait une « Response to the “Prosecution’s application to postpone or cancel the appeal hearing scheduled for 11-13 May 2020 and to consider alternative proposals to expedite the appeal”»18 dans laquelle elle se joignait à la demande du Procureur pour demander le report de l’audience, notant « in particular the concern that holding a hearing in May has the potential of endangering unnecessarily the health of the persons attending said hearing » . La RLV informait la Chambre d’appel de la situation à Abidjan et indiquait : « This situation renders extremely challenging the contact and meeting with the Victims and impossible for the Field Counsel based in Côte d’Ivoire to travel to attend the hearing » .
Discussion.
1. Obstacles sanitaires, techniques et procéduraux à la tenue d’une audience le 11 mai 2020.

1.1.Impact de l’épidémie de COVID-19 sur la tenue d’une audience physique le 11 mai 2020.

17. La Défense de Laurent Gbagbo partage l’inquiétude qu’a exprimée le Procureur concernant le risque que ferait courir aux participants la tenue d’une audience le 11 mai 2020. Dans les circonstances actuelles, du fait de la pandémie mondiale de COVID-19, il y aurait en effet un danger de contamination pour tous ceux qui participeraient à l’organisation d’une audience le 11 mai 2020.

18. Comme le relève le Procureur dans sa requête , la crise actuelle a conduit à l’adoption de mesures restrictives d’activité dans de nombreux pays, y compris la France, les Pays Bas, la Belgique et la Côte d’Ivoire, qui réduisent de manière drastique les activités sociales et professionnelles et limitent les contacts entre individus jusqu’à interdire les regroupements. En France, le confinement total avec interdiction de circuler – qui a conduit à la suspension de la plupart des activités économiques – a été étendu jusqu’au 11 mai 2020 , avec à ce jour, peu de précisions sur les conditions de mise en œuvre du déconfinement qui ne sera de toute façon que progressif . La situation est similaire en Belgique, où les mesures de confinement ont été prolongées jusqu’au 3 mai 2020 , y compris les limitations concernant les déplacements en dehors de la Belgique . Aux Pays-Bas, des mesures de distanciation sociale strictes sont mises en œuvre26. Les écoles et les crêches sont pour le moment fermées jusqu’au 11 mai 2020, et tous les rassemblements publics sont interdits au moins jusqu’au 1 juin 2020, meme ceux de moins de 100 personnes .

19. Il est important de relever que le nombre de décès continue à augmenter en Europe et que les spécialistes mettent en garde contre une seconde vague de contamination. Malgré les mesures de distanciation sociale, le nombre de décès aux Pays-Bas atteignait les 3 751 mort le 20 avril 202028 et, comme le note le Procureur, « it is estimated that the true figure for deaths from the virus is likely to be double the present RIVM one. And even on the official death rate alone, the Netherlands has the 10th highest number of deaths in the world (a case fatality rate of 11.3% of those diagnosed with the infection) and has the 6th highest per capita COVID-19 mortality rate in the world (19.31 deaths per hundred thousand population).»29.

20. L’épidémie à laquelle font face les pays européens est donc loin d’être jugulée, encore moins maîtrisée. Ceci a conduit les organisations internationales présentes en Europe à réduire leurs activités au strict minimum. En plus des exemples mentionnés par le Procureur, le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux qui a repoussé toutes les audiences se tenant à La Haye jusqu’au plus tôt début juin 2020 et la CIJ qui a étendu le 7 avril 2020 jusqu’au 31 mai 2020 la période pendant laquelle elle ne tiendrait pas d’audiences , la Défense relève que d’autres Cours internationales ont adopté des mesures destinées à réduire les risques, par exemple le report des audiences.

21. Au Tribunal Spécial pour le Liban, par une ordonnance du 8 avril 2020, le juge de la mise en état dans l’affaire Le Procureur c. Ayyash a prolongé jusqu’au 28 avril 2020 la suspension de l’ensemble des délais légaux applicables à la procédure , suspension initialement décidée le 13 mars 2020 et prolongée le 23 mars 2020.

22. La Cour européenne des droits de l’homme a annulé toutes les audiences prévues pour mars et avril 2020 et a prolongé les délais procéduraux pour une période de deux mois à compter du 16 avril 2020 (après les avoir prolongé d’un mois à compter du16 mars 2020).

23. Le 2 avril 2020, la Cour de justice de l’Union européenne reportait au-delà du 15 mai 2020 les audiences de plaidoirie prévues , prolongeant ainsi le report qu’elle avait décidé le 31 mars 2020 .

24. Le 16 avril 2020, la Cour interaméricaine des droits de l’homme allongeait les délais de procédure au 20 mai 2020 .

25. Ces reports et suspensions de délais sont la manière que ces Cours ont trouvé pour se conformer aux mesures prescrites par les autorités publiques, limiter les risques de propagation du virus et par conséquent protéger tous les membres de leur personnel et les intervenants extérieurs.

26. Tenir une audience physique le 11 mai 2020, alors que la situation sanitaire n’a pas fondamentalement changé et que les autres cours et tribunaux ont étendu la limitation de leurs activités au-delà de cette date constituerait un risque médical et sanitaire pour tous les intervenants. Comme le rappelle le Procureur, « the Court owes a duty of care to people at risk on account of the activities of the Court. Holding a hearing in May 2020 in these circumstances carries unnecessary and avoidable risks »38.

1. 2.L’organisation d’une audience dématérialisée poserait des problèmes spécifiques.

27. L’une des solutions pour éviter une contamination directe entre intervenants à l’audience pourrait être la mise sur pied d’une audience virtuelle, par voie informatique. Il apparaît que la tenue d’une audience dématérialisée entrainerait des difficultés rendant son organisation problématique, notamment :

- La question du matériel informatique :

28. une audience dématérialisée présuppose que tous les intervenants disposent du matériel informatique adéquat au bon fonctionnement des logiciels utilisés lors de cette audience. Or les membres des équipes de Défense disposent d’ordinateurs différents les uns des autres, certains âgés. Il n’est donc pas sûr qu’ils disposent de la capacité technique de participer à l’audience.

29. Et en l’état actuel des choses il est impossible d’imaginer que des membres des services IT se déplacent au domicile des différents membres de chacune des équipes pour vérifier le matériel dont ils disposent et eventuellement leur fournir un matériel adéquat. Il est encore plus difficile d’imaginer qu’un membre du service IT puisse être à disposition de chacun des membres des équipes lors de l’audience en cas de dysfonctionnement éventuel du matériel. Autrement dit, le soutien logisitique et informatique fourni par les services compétents du Greffe ne pourrait être, en cas d’audience dématérialisée, aussi efficace que dans le cas d’une audience physique.

30. En outre, si des membres du service IT devaient être envoyés auprès des membres de l’équipe de Défense et de Laurent Gbagbo, il conviendrait qu’ils soient testés avant tout contact avec des membres des équipes de Défense, de l’Accusation ou de la RLV, et les acquittés, pour éviter toute contamination, sachant qu’aujourd’hui il existe des doutes sur la fiabilité des tests moléculaires, qui peuvent présenter un haut degré de résultats faux-négatifs.

31. Ainsi, concernant les tests de dépistages COVID-19 par RT-PCR, le Syndicat des biologistes français souligne que leur sensibilité, lorsqu’ils sont réalisés par prélèvement nasopharyngé, est comprise entre 65-70 %39 et donc que « Sur 100 patients que vous testez, il y en a 30 à côté desquels vous passez » . Comme le souligne aussi un professeur en médecine à Yale et selon une étude chinoise , le taux de faux négatifs serait d’environ 30% . D’autres résultats annoncent une sensibilité du test par PCR de 50-79% selon le protocole utilisé . Il se peut qu’un patient contagieux soit testé négatif selon le stade de la maladie auquel il est testé : par exemple, pendant la phase d’incubation ou tout à la fin de la maladie .

- La question de l’interprétation :

32. une audience dématérialisée présenterait des difficultés en ce qui concerne l’interprétation des propos des Parties et participants dans les deux langues de travail de la Cour, puisqu’il faudrait prévoir 1) la présence lors de l’audience d’interprètes, 2) plusieurs canaux linguistiques afin que les débats puissent être suivis dans les deux langues ; 3) l’accès
La question de l’interaction entres les membres des équipes :

33. une audience dématérialisée rendrait plus difficile la nécessaire interaction pendant l’audience entre les membres d’une même équipe, limitant leur communication et surtout empêchant l’échange physique de documents indispensables pour soutenir une intervention non-prévue en audience.

- La question de la publicité des débats :

34. La publicité des débats est une condition du respect du principe d’équité de la procédure. Elle doit donc être assurée de la meilleure manière possible et le public doit pouvoir suivre les débats dans les mêmes conditions que lors d’une audience physique. Cette question de la publicité est d’autant plus cruciale ici qu’il s’agit d’une audience extrêmement importante dans une affaire qui est elle-même extrêmement importante. Il est crucial que le grand public, et en particulier les ivoiriens, puisse avoir accès aux débats.

- La question de la confidentialité :

35. Il serait plus difficile de garantir la confidentialité des échanges entre les membres d’une équipe dans le cadre d’une audience dématérialisée. Dans le même sens, maintenir la confidentialité des débats lors d’un éventuel passage à huis clos partiel serait plus difficile. En outre, le fait que les intervenants participent à l’audience à partir de leur lieu de confinement pose la question du maintien de la confidentialité dans un lieu où pourraient être présents des membres de leur famille, d’éventuels colocataires, etc. La situation est très différente de celle qui prévaut lorsqu’un témoin est interrogé par vidéo-conférence puisqu’alors tout est organisé techniquement sur place par le Greffe pour que la confidentialité de ce que dit le témoin soit préservée.

La question de la nature de l’audience :

36. Une audience est une interaction dynamique entre participants qui produit un certrain nombre de résultats. C’est la nature d’une audience que d’être dynamique. C’est à cette condition – du fait de l’interaction dynamique entre participants – que se dessine au fur et à mesure de l’audience un résultat. La dynamique de chaque audience a sa logique propre. L’interaction dynamique et libre avec les Juges et entre les différents protagonistes, ne peut être totalement prévisible, puisqu’elle dépend des thèmes et de la manière dont ils sont abordés. En ce sens, une audience aussi complexe est très différente d’une simple session d’un parlement ou d’un simple procès domestique où l’organisation des débats est plus simple. Or, organiser une audience dématérialisée aurait pour conséquence de réduire la dynamique entre protagonistes ne serait-ce que parce que une telle audience ne peut présenter les mêmes garanties d’interactivité et de dialogue nécessaires qu’une audience physique.

37. Dans le même sens on peut ajouter que plus le champ de l’audience est large, et plus les questions sont importantes et demandent à être approfondies, moins une audience dématérialisée serait susceptible de répondre aux enjeux. Limitant la possibilité d’interaction des protagonistes et leur capacité à s’exprimer pleinement, l’organisation d’une telle audience dématérialisée pourrait conduire à des atteintes à l’équité de la procédure.

1.3. Dans les circonstances particulières dûes à l’épidémie de COVID-19 la préparation de l’audience est rendue plus difficile.

38. Comme pour une audience physique, l’épidémie de COVID-19 a un impact sur la préparation d’une audience dématérialisée.

39. Comme le relève le Procureur, le 11 mai est une date trop rapprochée du fait de l’impact de l’épidémie sur l’organisation du travail : « This leaves the Parties and participants with only a very short time to prepare for the hearing, which is particularly challenging in the current circumstances given the difficulties that they are currently facing in working remotely, while handling other urgent health and family related issues » .

40. Le Procureur précise que : « Counsel, working remotely, are simply not equipped to properly access this record. Although some documents can be accessed through CITRIX, the process is slow (preventing access to multiple documents at the same time) and heavily interrupted by technical challenges, including frequent and sometimes severe interruptions to access. Further, confidential documents and transcripts cannot, as per the existing information security protocols, be printed or held by staff members at home. Therefore, in order to properly prepare for the hearing, so as to best assist the Appeals Chamber, and to properly discharge their professional responsibilities owed to the Court, counsel would need to access their offices for significant periods of time (likely most of the remaining working days and weekends), so as to make proper and efficient use of the little time remaining before the hearing. This could create unnecessary risks for counsel’s health and well-being » .

41. Quant à la RLV elle précise que : « the difficulties identified in the Application equally apply to the Legal Representative’s team. In this regard, the Common Legal Representative informs the Chamber that the situation in Abidjan is also evolving rapidly. Staff of the Court’s Field Office based in Abidjan work remotely. The Government of Côte d’Ivoire has implemented measures to limit the spread of COVID-19, including i) gatherings of more than 50 people are banned; ii) social distancing is in effect; iii) all non-essential movements are discouraged; iv) the airport has suspended all regular passenger planes for an indefinite period. Some diplomatic missions have been given permission to operate repatriation flights for their citizens on a limited basis; v) a 9pm to 5am curfew remains in effect nation-wide; vi) inter-city travel, apart from certain emergency services and exceptions, is prohibited; vii) face masks/cloth face coverings are mandatory in public in the greater Abidjan area; viii) vulnerable people, including the elderly and those with chronic health conditions, should remain at home (both categories include a relevant number of the Common Legal Representative’s clients). This situation renders extremely challenging the contact and meeting with the Victims and impossible for the Field Counsel based in Côte d’Ivoire to travel to attend the hearing »47.
42. La Défense note qu’une audience aussi cruciale requiert une préparation importante qui, comme le souligne le Procureur dans sa requête, est rendue difficile dans les circonstances exceptionnelles dûes à la crise sanitaire. La Défense note en particulier que préparer une audience, qu’elle soit physique ou virtuelle, exige de tenir des réunions physiques entre membres de l’équipe pour des raisons à la fois pratiques, d’efficacité et de confidentialité.

1.4.Un certain nombre de questions procédurales ne pourront être réglées avant le 11 mai 2020.

43. La Défense note que la tenue d’une audience le 11 mai 2020 supposerait que les questions procédurales suivantes soient réglées :

44. 1) puisque la Défense doit déposer sa réponse aux observations de la RLV le 11 mai 2020, premier jour de l’audience, cette réponse ne pourra être prise en compte par les Juges et les Parties lors de l’audience, alors qu’ils disposeront des arguments de la RLV ; il y aura donc là rupture de l’équité ;

45. 2) Puisque la version définitive en français des observations de la RLV ne sera notifiée à la Défense qu’à la fin mai 2020, ce n’est qu’après cette date, selon la décision de la Chambre d’appel du 20 avril 2020 , que la Défense saura si elle doit amender sa réponse ;

46. 3) Puisque la version définitive en français des raisons du Juge Henderson ne sera notifiée à la Défense qu’en Juillet 2020 , ce n’est qu’après cette date et après analyse détaillée de la version française officielle du Jugement d’acquittement que la Défense saura si elle doit amender sa réponse au mémoire d’appel du Procureur ;

47. 4) Le Procureur a indiqué le 14 avril 2020 qu’en lieu et place d’une réplique écrite à la réponse de la Défense à son mémoire d’appel, il répliquerait oralement lors de l’audience50.
Or, cette annonce d’une réplique orale – à considérer qu’elle ne soit pas soumise à l’autorisation de la Chambre d’appel comme peut l’être une réplique écrite – ne délie pas le Procureur de son obligation d’indiquer préalablement à la tenue de l’audience (et suffisamment à l’avance pour que les Juges la Défense et la RLV puissent s’organiser) les points qu’il souhaiterait soulever et la manière dont il compte les aborder afin que la Défense puisse y répondre lors de l’audience.

48. 5) La Chambre d’appel, 13 jours ouvrés avant le début de l’audience, n’a toujours pas informé les Parties et participants des thèmes qu’elle souhaiterait aborder lors de l’audience, ce qui, même à considérer qu’elle les communique rapidement, ne laisse pas de temps suffisant, comme le souligne le Procureur dans sa requête, aux Parties et participants pour préparer dans de bonnes conditions, en particulier compte-tenu des circonstances dues au COVID-19 (cf supra), une audience le 11 mai 2020.

49. Pour toutes ces raisons sanitaires techniques et procédurales, la Défense de Laurent Gbagbo s’associe au Procureur et à la RLV pour demander le report de l’audience prévue le 11 mai 2020.
2. Sur la suite de la procédure d’appel.

50. En attendant que l’audience d’appel puisse être organisée de façon satisfaisante d’un point de vue sanitaire, dans des conditions respectant l’équité de la procédure et après que les questions procédurales pendantes soient réglées, la Défense ne s’oppose pas à la proposition du Procureur visant à ce qu’une partie de la procédure d’appel, préalable à la tenue de l’audience, soit menée sous forme écrite. A cet égard, la Défense présente les observations suivantes :

51. Toute procédure écrite suppose 1) que la Défense ait pu répondre préalablement à la RLV et 2) qu’ait été clarifiée la question de la réplique du Procureur. En effet, comme rappelé précédemment, le Procureur indiquait le 14 avril 2020 qu’il ne déposerait pas de demande de réplique à la réponse de la Défense à son mémoire d’appel, mais qu’il répliquerait à l’audience. Si l’audience devait être reportée, le Procureur devrait indiquer s’il compte revenir sur sa décision initiale et déposer une demande de réplique écrite. Ceci devrait être fait avant que la Chambre pose d’éventuelles questions écrites aux Parties et participants. Si tel était le cas, il conviendrait d’organiser la procédure écrite en conséquence, afin que préalablement le Procureur dépose sa demande, que la Défense puisse y répondre et, que la Chambre d’appel se prononce sur cette demande. Si la Chambre d’appel devait accéder à la demande du Procureur, il conviendrait alors qu’elle détermine un délai pour que le Procureur dépose sa réplique et que la Défense puisse y répondre. Ce n’est qu’à l’issue de ce délai que la Chambre d’appel pourrait être en possession de toutes les informations utiles et poser aux parties et participants des questions écrites.

52. Une fois ces questions procédurales tranchées, la Chambre d’appel pourra être en mesure de poser des questions écrites aux Parties et participants. La Défense note que le délai imparti aux Parties et participants pour répondre à ces questions ne peut être fixé de manière abstraite à 21 jours (comme le suggère le Procureur dans sa demande ) et dépendra de plusieurs facteurs.

53. Le premier facteur se rapporte aux conditions de travail des membres des équipes prévalant à ce moment là. A ce sujet, La Défense relève que le Procureur a mentionné de considérations qui pourraient affecter sa capacité à préparer ses réponses aux questions de la Chambre : « In addition to the issues outlined above, these include matters such as: working while also simultaneously home-schooling children and attending to other family care responsibilities; challenges stemming from counsel not being able to have in-person meetings and to consult other team members quickly and with the same degree of ease as in the office; working on small laptops with small screens; diminished access to research books and materials; diminished access to trial transcripts and exhibits; and difficulties in printing documents from home » .

54. Le second facteur se rapporte à l’importance et aux nombre des questions posées par la Chambre. Le choix des questions par la Chambre déterminera la façon dont les Parties et participants devront répondre et la charge de travail qu’une telle réponse induit. Par exemple, une question pourrait porter sur la manière dont la Chambre d’appel comprend le second moyen d’appel du Procureur. En effet, alors que le Procureur le présente comme un moyen fondé sur une erreur de droit/de procédure, il présente à son soutien des exemples factuels, ce qui pourrait conduire les Juges à considérer qu’il s’agit plutôt d’un moyen fondé sur des erreurs de fait (ce que le Procureur concède lui-même dans son mémoire d’appel ). Il est bien évident que si la Chambre d’appel devait estimer que ces « exemples » devaient être considérés sous l’angle d’erreurs de fait, les Parties et participants devraient présenter des soumissions additionnelles à la Chambre d’appel puisque, par exemple, dans sa réponse écrite, la Défense a abordé ces « exemples », suivant le Procureur, sous l’angle de l’erreur de droit/de procédure. Il s’agit d’un point très important puisqu’il conditionne l’analyse de la preuve à effectuer et le standard de preuve applicable.

55. Une fois déposées par les Parties et participants leurs réponses écrites aux questions des Juges, il conviendra que les Juges leur permettent de formuler des observations sur les réponses des autres protagonistes, afin que le débat soit le plus complet possible et afin de préserver l’équité de la procédure.

56. Ces échanges d’écritures permettront, au moment où l’audience d’appel pourra être tenue, de la limiter aux questions ciblées qui resteront en suspens. Autrement dit, plus les échanges écrits préalables à l’audience seront complets et plus ils permettront un véritable échange entre Parties et participants, plus ils permettront que l’audience soit menée de la manière la plus efficiente possible. L’audience d’appel est un moment important de la procédure d’appel ; elle est prévue par la plupart des juridictions pénales internationales ; il y a eu une audience dans toutes les affaires qui ont été portées en appel devant la Cour pénale internationale (à l’exclusion de l’unique affaire d’outrage dont elle a eu à connaître). Permettre qu’une telle audience se tienne dans les meilleures conditions donnera toute sa signification au principe d’équité de la procédure, puisque chacun aura pu alors s’exprimer de façon extensive sur tous les points qui lui auront paru importants.

PAR CES MOTIFS, PLAISE À LA CHAMBRE D’APPEL, DE :

Prenant en considération la requête du Procureur, la situation sanitaire liée à l’épidémie mondiale de COVID-19 et l’exigence d’avoir à conduire, étape par étape, une procédure équitable :
- Reporter l’audience prévue le 11 mai 2020 à la date qu’il lui plaira de fixer ;
Et :
- Adopter un calendrier pour la suite de la procédure qui prenne en compte les étapes procédurales énoncées aux paragraphes 44 à 48 et 51 à 56 des présentes soumissions.

_____________________________ Emmanuel Altit
Conseil Principal de Laurent Gbagbo

Fait le 21 avril 2020 à La Haye, Pays-Bas
"CPI : La défense du Président d'accord pour un report de l'audience prévue le 11 mai 2020
PAR CES MOTIFS, PLAISE À LA CHAMBRE D’APPEL, DE :
Prenant en considération la requête du Procureur, la situation sanitaire liée à l’épidémie mondiale de COVID-19 et l’exigence d’avoir à conduire, étape par étape, une procédure équitable :

- Reporter l’audience prévue le 11 mai 2020 à la date qu’il lui plaira de fixer ;

Et :

- Adopter un calendrier pour la suite de la procédure qui prenne en compte les étapes procédurales énoncées aux paragraphes 44 à 48 et 51 à 56 des présentes soumissions.

__ _____________________________
Emmanuel Altit
Conseil Principal de Laurent Gbagbo
Fait le 21 avril 2020 à La Haye, Pays-Bas"

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