La première mission est d’enraciner la démocratie en côte d'ivoire car c'est un impératif pour nous

  On aurait pu attendre le 7août, faire un grand défilé et on serait allé s’asseoir à la maison. Je n’ai pas voulu de cela. Parce que cela fait 50 ans que nous défilons et nos Militaires savent défiler. Il aurait suffi que je demande au Général Mangou (Ndlr : Général de Division, Chef d’Etat- Major des Armées) d’apprêter les troupes pour faire un défilé gigantesque. Ce n’est pas ce que nous avons voulu. (…) Le Cinquantenaire de l’Indépendance des pays Africains francophones, doit être en même temps un regard sur les 50 ans passés de l’Afrique. (.. .)

    La question qui se pose à nous aujourd’hui, est ceci : ‘’voici 50 ans que l’Indépendance a été proclamée ; que devient le pays ? Et nous- mêmes, que devenons-nous ? Comment avons-nous utilisé nos 50 ans d’Indépendance et qu’est-ce-que nous allons demander aux enfants et à nos petits- enfants de faire dans les 50 autres années à venir ? Tel est le problème que je pose et telle est la raison pour laquelle j’ai mis en place cette Commission.
  Je pense qu’on a trop dansé en Afrique ; on a trop chanté ; on a trop rigolé. Maintenant, il faut réfléchir pour savoir d’où on vient et où on va ! Il faut qu’on sache d’où on vient et où on va.

(…) Il nous faut réfléchir mais, est-ce-que ce sont les ivoiriens seulement qui doivent réfléchir ? L’Afrique ? Cela me préoccupe. En 1960 tous les pays ont les partis uniques. (…)

Donc, il faut réfléchir pour voir comment on corrige cette faiblesse. Les partie uniques, les coups d’Etats, les guerres civiles ; en profondeurs. Et puis, il ya des pays où il y a eu les deux en même temps : la guerre civile, le coup d’Etat ; et même le coup d’Etat dans la guerre civile. Pourquoi toutes ces plaies sur l’Afrique ? Pourquoi ? C’est de tout cela que je veux qu’on parle ; qu’on réfléchisse. Pourquoi l’Afrique ne décolle-t-elle pas ? C’est une autre question.

Il y a  des pays qui sont outrancièrement riches en Afrique. Mais, ces pays-là sont comme quelqu’un qui est assis sur un sac de diamant et qui a faim. Bien entendu, tu peux être assis sur un sac de diamant et mourir de faim ! Parce que qu’on ne mange pas le diamant. Il faut donner une valeur économique au diamant, de l’argent et en retirer ; et à partir de cet argent, faire de l’agriculture ou acheter à manger. Mais, si vous vous contentez d’être assis sur le sac de diamant, vous mourrez de faim. Il y a des pays qui disent : « je suis riche ! Mais, tu n’as rien, puisque tu tends toujours la main pour payer tes fonctionnaires. Chaque fois que tu veux payer tes fonctionnaires, tu te tournes vers l’étranger pour le faire. Donc, il faut qu’on réfléchisse aussi à cela. Pourquoi, ne travaille-t-on pas, puisque les techniques pour mettre en valeur nos matières premières sont déjà connues et elles appartiennent à l’humanité ? Pourquoi, ne travaille-t-on pas ?(…)

Quelle est donc la place que nous donnons au travail ? Quelle est la place que nous donnons à l’invention ? a la créativité ? Quelle est la place que nous donnons à l’indépendance ? C’est tout cela qui forme l’indépendance. Quelles sont les chemins de l’indépendance ? Parce que dans 50ans, il ne faut pas que le Président de la République de Côte d’ivoire soit ici, et répète le même discours que je fais aujourd’hui. C’est pourquoi nous devons réfléchir. Et puis l’Etat, en Afrique, l’Etat, c’est quoi ? Est-ce que les gens savent même ce que c’est que l’Etat ? Il m’arrive de rencontrer des gens qui ne savent même pas ce que c’est que l’Etat. Et ils n’ont même pas envie de la savoir. (…)

L’Etat, c’est beaucoup de responsabilités. Pendant que vous être à la maison et que vous dormez tranquillement la nuit, moi, je veille. Et tous les Président veillent. Parce qu’il faut réfléchir. Dans la journée, il faut que je résolve vos problèmes et la nuit, il faut que je réfléchir pour trouver les solutions aux problèmes à venir.(…)

Quelle est la nature de notre indépendance ? où est-ce qu’elle nous a conduit ? Où est-ce que nous devons aller demain ? voici, Monsieur le Président , les colles que je vous ai données ; les devoirs que je vous ai donnés . vous avez quelques mois pour que ces devoirs soient faits. Il faut absolument que ces devoirs soient faits parce que notre génération, cette génération, Monsieur le Président Pierre Kipré, a au moins deux missions à réaliser.

La première mission est d’enraciner la démocratie. Je dis que tant qu’on voudra faire plaisir à des amis à l’extérieur, on ne pourra pas la faire. On fera une mauvaise démocratie. La démocratie n’est pas faite pour faire plaisir a des gens à l’extérieur. La démocratie, nous l’exigeons parce qu’elle est indispensable à notre propre vie. Sinon, comment allons ‘nous choisir nos responsables ? Dans ce pays, il y a des Bété, des Wê, des Dan, des Sénoufo, des Malinké, des Gouro, des Baoulé, des Agni, …et chacun a son mode de fonctionnement. Si nous ne faisons pas la démocratie et ne donnons pas la parole à tous les peuples pour choisir quelqu’un sur lequel tout le monde est d’accord, quel mode de fonctionnement allons-nous choisir ? Le mode de fonctionnement Baoulé ou le mode de fonctionnement Bété ou le mode de fonctionnement Sénoufo ? C’est impossible. On ne peut pas s’en sortir.

Donc, la démocratie est un impératif pour nous. Ne croyez pas qu’en appliquant la démocratie, nous faisons plaisir à quelqu’un ! Jamais. Nous réglons nos propres problèmes de fonctionnement de l’Etat ivoirien. Alors, si nous avons des amis à l’extérieur qui sont contents, c’est tant mieux pour nous. Mais, ce n’est pas pour eux que nous faisons la démocratie. Nous faisons la démocratie pour régler nos propres problèmes. Il faut que les Ivoiriens comprennent cela. C’est ma première observation.

La deuxième observation, c’est qu’il faut que les ivoiriens comprennent que les problèmes de la Côte d’ivoire appartiennent aux Ivoiriens et ils doivent les régler. Depuis 1990, qu’il y a eu le multipartisme, c’est une catastrophe. On nous dit : Ah, oui, il faut aller mettre sur pied une Commission internationale. Mais pour faire quoi ? les commissions internationale pour faire quoi ? S’il y a un problème, on le règle ici, entre nous. Pourquoi va-t-on aller chercher l’ONU ou l’UNESCO ? Pourquoi ? Pour faire quoi ? Ce n’est pas leur travail ; ce n’est pas leur problème.

Je suis toujours étonné de voir mes compatriotes parler de Commission internationale,… Commission ivoirienne. Tant que les ivoiriens n’apprendront pas à régler, eux-mêmes, leurs problèmes, ils sont perdus. La Côte d’ivoire a des règles. Observons ces règles et ces lois et continuons notre chemin.

Monsieur Pierre Kipré, Ambassadeur, cher ami, cher frère, cher collègue, et cher Patron il est mon Patron parce qu’il est professeur titulaire, et moi, je suis Maître-assistant voici les devoirs que je vous donne pour que nous puissions réfléchir. (…)

Chers amis, je déclare ouverte, l’année du Cinquantenaire de la Côte d’ivoire.

Que Dieu bénisse la Côte d’Ivoire ;

Que Dieu bénisse l’Afrique ; Je vous remercie.